20110915

Niue

Août 2011

GPS ( 19’03.3S, 169’55.4W)

Après 8 jours de navigation, nous faisons escale à Niue, à la fois une île et un pays. James Cook découvrit l’île en 1774 et essaya par 3 fois d’y débarquer. Les guerriers l’ont empêché. Il la baptisa île des sauvages. Vrai que l’île est inhospitalière aux premiers abords. Pas de bons ancrages, les pentes y sont fortes, les fonds vite profonds. Pas de baie protégée. Devons être prêts à quitter à tout moment, si le vent tourne à l’ouest. La houle qui fouette constamment la côte ne permet pas d’y débarquer en annexe. Celle-ci doit à chaque fois accoster à un quai et y être hissée avec une grue. Pour vrai.

L’équipage réussit à fouler le sol lors de la première tentative et sans bain de sang. Petite île dont le tour en voiture ne prend qu’une heure. Petit pays qui ne compte que 1300 habitants parlant le « niuean » et l’anglais. Dans les villages, une maison sur trois est abandonnée, la place se vide. Le pays est sous l’aile de la Nouvelle-Zélande, les jeunes s’y exilent. Très peu de travail. Toute denrée importée coûte atrocement cher, long chemin que doit parcourir le cargo pour livrer toute petite quantité de choses.

Gens fiers. Une fête dans un village voisin. Trop loin pour s’y rendre à pieds, 16 km. On fait du pouce, à peine le temps de lever le doigt et nous voilà assis. On nous raconte plein de choses en route. Les gens ont peu mais ils s’arrangent. Ils cultivent, ils cueillent, ils élèvent, mais ne quémandent pas. Ça serait honteux. Explique pourquoi la première voiture qui passa nous a embarqués ?

Gens pieux. Tout s’arrête le dimanche, la plupart des habitants vont à l’église le matin et une seconde fois l’après-midi. Vêtus comme pour aller à un mariage et coiffés d’un chapeau. Pas nécessairement catholiques, 6 confessions différentes.

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Géologiquement parlant, Niue est différente des îles visitées jusqu’ici. Formée d’un gros plateau de corail soulevé par un volcan sous-jacent. Une marche en forêt nous permet d’observer de gros morceaux de coraux desséchés à travers lesquels les arbres ont poussé. Ce bouleversement a aussi créé plusieurs grottes à stalactites et stalagmites. L’île tente de développer le tourisme et a mis tout ceci en valeur en aménageant des sentiers aux jolies infrastructures pratiques. Mais l’attrait principal, les superstars, ce sont les baleines à bosse.

Elles partagent leur temps entre l’Antarctique où elles se gorgent de krill et ici où elles mettent au monde leurs petits et en font d’autres. Un périple de 6000 km qu’elles font chaque année et qui les mène à Niue, Tonga ou Samoa. Un très long périple aux multiples dangers, il ne fait pas beau sous ces latitudes. Son ancêtre vivait sur la terre ferme, comme nous avant. Il a pris la mer et s’y est adapté. Fascinante adaptation. Le marin ultime.

 

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La nuit, les baleines préfèrent les endroits calmes pour dormir, comme nous en voilier. Des endroits protégés du vent et des vagues. Elles doivent respirer et dorment en surface. Au mouillage, nous les entendons souffler la nuit, tout près. À travers la coque, nous entendons leurs chants. Très troublant. Ça fait planer les parents, mais ca empêche Camille de dormir.

Un bel après midi ….

« Une baleine ! une baleine ! une baleine ! une baleine ! une baleine ! Une baleeeeeeeeeine !» dit Rosemarie.

Tous bondissent dans le cockpit. Elle est à 100 pieds du voilier et nage droit sur nous. On fige, première fois qu’on en voit de si près. Pas le réflexe d’attraper masque et palmes. Pas le réflexe de sauter à l’eau. L’eau est cristalline, on voit la baleine glisser tout doucement sous notre quille et disparaître dans les profondeurs. De toute évidence et sans équivoque aucune, c’est une invitation. Pour plus tard toutefois, elle ne refait surface que très loin.

 

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Lorsque le plus tard est arrivé, elle n’y était pas. Sûrement un retard ou un oubli de sa part. Tentons une visite en étant politiquement, écologiquement et parentalement correct. Hop dans l’annexe, laissons-nous dériver.

Après une vingtaine de minutes, nous aperçevons le jet caractéristique entre nous et la côte. Un type dans son annexe est pratiquement à côté, tous sautent à l’eau. Bleu profond, un bleu insondable remplit de bruit. Quelque chose de très gros y chante très fort. Sous l’eau, difficile d’identifier la provenance d’un son, il vient de partout à la fois, on baigne dedans. Le type fait des signes, la baleine est toujours près de lui. Glissons-nous dans ses parages le plus invisiblement possible. La famille nage en tirant l’annexe, l’écart diminue et le son s’amplifie.

Nous voici au-dessus. On distingue la silhouette de la baleine par le blanc qui borde ses nageoires. Elle est là, sous nous. Elle est immobile, le corps légèrement inclinée vers le bas. Elle chante pour attirer un partenaire. Elle chante fort pour que ça porte loin, pour que ça impressionne. C’est partout, ça fige. Fatiguant cette manie qu’on a de figer en présence d’une baleine. Une chance que c’est pas méchant.

Le chant est une succession de basses et hautes fréquences. Dans les graves, on sent les vibrations dans tout notre corps, comme lorsqu’à proximité d’une caisse de son. Le cachalot et l’orque, des cousins, s’en servent pour chasser. Ils peuvent assommer certaines proies d’un son pour mieux les attraper.

Devant un auditoire ébahit et sans aucun mouvement perceptible, le géant se met à remonter tout doucement. Le plus doucement du monde. L’énorme masse se précise, le chant varie, moins fort, plus aigu, comme une plainte. La baleine nous regarde, on sent l’intelligence. Tout s’arrête, le temps, la respiration, le clignement des yeux. Envoûtement total. Avons l’impression d’être en présence de quelque chose de très puissant, de très vieux et de très sage. L’impression d’être en présence de Yoda, un très gros Yoda à fanons. On fige.

Elle émergea pour respirer et le fit 3 fois. Puis, d’un léger mouvement de queue, elle glissa majestueusement vers les profondeurs et disparut dans le grand mystère bleu. Une baleine, c’est la mer incarnée.

On a tout filmé, en voici des images.

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