20101118

Santa Marta

Nous nous arrêtions ici pour faire escale avant la traversée du Rio Magdalena. Ce fleuve, qui traverse la Colombie sur plus de 1500 km, se jette dans la mer des Caraïbes à 38 miles d’ici. Important de passer l’embouchure de jour et reposés, afin de pouvoir éviter les nombreux débris qu’il a accumulés en chemin.

Santa Marta et la baie voisine de Rodadero sont des lieux de villégiature en bord de mer. Le touriste ici, c’est le colombien venu de Bogota ou d’ailleurs dans les terres. Tous les gens qui ne sont jamais venus nous ont dit d’être très prudents. Tous ceux qui sont déjà venus nous ont dit qu’il n’y avait rien à craindre. Avec les violences que le pays a connues par le passé, le touriste étranger se fait rare. Nous étions donc un peu sur nos gardes, le chien en était bien avertit.

La violence est endémique ici depuis toujours, comme si la révolution de Bolivar courait encore. Il est partout Bolivar. Une statue par ici, une université par là. Partout comme les fusils, à tous les coins de rue.

Le choc des premiers pas, des premières rencontres lors d’une nouvelle escale est un moment fort. Nous partons habituellement tout de suite à la recherche du marché et le contact avec le monde de l’endroit est direct et sans filtre. En débarquant, une rue encombrée, deux gars en uniformes sur une petite moto qui fume. La suspension est écrasée, la
moto zig zag entre les voitures. Le militaire assis derrière tient un fusil d’assaut M16, la crosse calée dans sa hanche, le canon qui pointe vers le haut. Imaginez tout ce qui peut mal tourner. Imaginez la scène sur René-Lévesque à Montréal. « Por favor senior, est-ce qu’il y a eu un coup d’état ? » Tout le monde autour a l’air calme, allons faire l’épicerie.
 
Plus tard, un colombien sur la plage s’est mis à nous chanter la Marseillaise lorsqu’il nous a entendu parler français : «Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons ! Marchons ! Marchons ! …» Nous dit que c’est une très belle chanson, que ça le touche, main sur le cœur, sourire aux lèvres.

La relation avec les armes est différente ici. Chez nous, celles qu’on voit en public sont gérées avec le plus grand soin. Leurs porteurs sont graves, droits, presqu’au garde à vous. Ici, un soldat assis sur un banc, parlant au cellulaire et M16 couché sur les genoux, ça fait parti du paysage. Tellement d’armes que finalement ça n’impressionne plus personne.


La plage n’a pas cessé de gronder lors de notre séjour. Musique latino ni amplifiée, ni enregistrée : des tams-tams, des accordéons, des voix, des guitares. Il y a des chaises qui forment des cercles. Les musiciens ne sont pas au centre, mais en marge. Le centre est réservé aux danseurs. Plusieurs cercles un peu partout sur la plage. Plein de monde à l’eau à 6 am, danse aérobique à 6 :30 am. Les fêtards croisent les sportifs au petit matin.


Ici, pas d’expérience avec le touriste riche qui dépense sans compter, pas d’animosité. Accueil franchement chaleureux, les gens sont contents de nous voir chez eux. Très chaleureux. Ils te parlent et t’approchent. Un type loue des pédalos sur la plage. Ils font le tour du voilier et filment. Qu’on soit à bord ou non. Nos coques se touchent. A plusieurs reprises, ils nous ont demandé d’embarquer pour voir le bateau. Même le sauveteur a ramené les filles en nageant à grosses brassées. Elles étaient pourtant sur leur planche et ne risquaient rien.


Notre espagnol prend du mieux. En prenant le mot français et en le terminant par « o » ou « a », on obtient quelque chose qui sonne à peu près espagnol. Pour faire un peu plus distingué, on applique désormais « to » ou « ta » aux verbes. Tout ceci à l’air facile, mais il faut quand même y penser. C’est pas toujours fluide, parfois même pénible. Les colombiens y sont toutefois très attentifs et démontrent beaucoup d’empathie. Ils nous accompagnent dans la douleur en nous regardant dans les yeux et en hochant lentement la tête. Cette recette fonctionne pour émettre le message mais pas pour décoder la réponse et après le 3e « no comprende », nous en sommes au langage des signes. Ils sont gentils les colombiens, ils ne se mettent à rire que lorsqu’ils ont compris le message et alors, nous rions tous ensemble.


Le chauffeur de taxi, lui, a réagit différemment. Au bord de la retraite, apparence soignée, il s’est appliqué à nous donner une leçon d’espagnol pendant tout le trajet séparant Santa Marta de Rodadero. On croit qu’il tentait de nous enseigner différentes formules de politesse pour demander le prix d’une course en taxi. À plusieurs reprises, il nous a lancé un air interrogateur pour valider le progrès. Malgré nos « no comprende », il continuait avec le sourire et beaucoup d’intonation. Arrivés à destination, il tendit sa main par-dessus son épaule et attrapa celle de Mélanie assise derrière. Il donna un gros bec dessus, aux filles aussi. Pour moi, ce fut une tape sur l’épaule.

 

Au grand plaisir de Camille et Rosemarie, on fête l’Halloween ici également. Cependant, on ne frappe pas aux portes des maisons, mais plutôt des commerces. Pour obtenir des bonbons, il y a une chanson espagnole à réciter. Elles n’en connaissaient que les 3 premiers mots. Parfois, ça allait, parfois pas. Frustrées de revenir bredouilles, elles ont infiltré un petit groupe de colombiens et ont fait du lipsync. C’est axé sur le « cute » plutôt que sur l’épouvante. Il y a des sorcières, mais elles sont mignonnes. Pas de verrues. Camille a semé l’émoi sur son passage, elle a même fait pleurer une petite fille. Désolé, ne savions pas. Choc culturel.                

Laissons les images vous parler de la beauté de la Colombie. La rose épineuse.

Nous sommes actuellement à Carthagène, impressions à venir.
 
Parc Tayrona, Sierra Nevada
  
  



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