20121212

Kalimantan, Île de Bornéo (2’44.5S, 11’43.9E)


Nous y étions le 15 août.

Avec sa superficie de 736 000Km2  cette île figure au 4eme rang en dimension, derrière l’Australie, le Groenland et la Nouvelle-Guinée.  

Le vent coopère de nouveau pour notre passage de 4 jours de Sulawesi à Bornéo. Arrivons en fin de journée. La berge de Kumai est bordée de colossaux édifices en béton gris. À quoi peuvent servir ces monstrueuses constructions percés de quelques ouvertures près du toit? Ces bâtiments sont des volières conçues pour imiter les falaises de roc et attirer les hirondelles. On les entend chanter non pas par milliers mais par dizaines de milliers. Semble que ce ne soit pas les oeufs, ni les oiseaux qui intéressent mais bien les nids. Les chinois les utilisent pour faire quoi? Si vous avez lu notre post de la Sépik, vous pensez surement à de la soupe. Et bien vous n’avez pas tort! Les nids auraient des propriétés médicinales, ce qui maintien ce commerce entre eux depuis des siècles. Étonnant!

L'ancre est à peine mouillée que des organisateurs de tours sont sur le bateau. Tôt le lendemain matin, nous partons pour une expédition de 2 jours sur rivière Kumai. Nous aurions aimé en passer 3 mais c'est la fin du Ramadan et il est impossible de trouver du personnel qui acceptera d'être sur la rivière le jour des célébrations. 

Notre guide Dayak nous montre différentes essences de la forêt. Parmi ses 800 espèces inventoriées, y figurent teck, ébène, bois de santal, acajou, rotin, figuier étrangleur. Il nous raconte que plus jeune il s'y promenait avec son grand-père qui lui a enseigné ce qu'il sait. Chassait sanglier avec sarbacane. Vivait en parfaite harmonie avec la forêt, ses plantes et ses animaux. S’y abritait, s’y soignait, s’y nourrissait. Il nous montre l’énorme tatouage que son grand-père lui a fait sur l’intérieur du bras avant de mourir. On y lit “DAYAK”, gravé en grosses lettres noires, le “D” touchant l’aisselle et le “K” rejoignant le coude. Pas vraiment bien fait, un cri du coeur.

“Fait surtout attention de ne pas sortir la nuit, car les tarentules chassent. Tu peux te faire piquer. Ne touche pas à la sève de cet arbre-ci, ça brûle. On trempe les pointe de flèche dedans.” Un monde nous sépare mais l’anglais nous permet d’échanger. À chaque fois que ce pont s’établit dans le voyage, évident à quel point nous sommes tous liés, à quel point notre nature est la même.

Nous montons à bord d’un klotok. L'embarcation faite de bois remonte l’étroite rivière jusqu’au camp Leakey où nous descendons pour voir les orangs-outangs. Des plates-formes ont été aménagées dans la forêt pour les nourrir. Dans le sentier qui nous mène vers la première, le guide les appelle en poussant des cris. On aperçoit d’abord des femelles et des petits, puis arrive Tom, le roi de la forêt. Ses bras font 2 mètres d’envergure, il est 8 fois plus fort qu’un homme. Chaque individu semble avoir sa propre personnalité et une physionomie différente. On observe des comportements humains. L’expression que l’on retrouve dans leurs yeux ne se voit pas chez d'autres espèces...à part nous! Son nom vient du mot malais qui signifie <<homme des bois>>. Se balancent d’arbre en arbre pour se nourrir et se font un nid de feuilles chaque soir dans le haut des arbres. La femelle s'occupe de son petit jusqu’à ce qu’il atteigne sa maturité, soit pendant 7 ans si elle est une femelle et 14 s’il est un mâle. La séparation est difficile pour le jeune orang-outang, sa mère tentera de le sevrer en lui volant sa nourriture.

DSCF7352    DSCF7367    

 
Le soir venu, nous dormons sur la rivière, à la belle étoile sous des filets à moustiques. Une famille de nasique est installée dans les arbres au dessus de nous.

Le parc que l'on visite habrite un centre de réhabilitation pour orangs-outangs orphelins. Il a été fondé par Dre Biruté Mary Galdikas en 1971 et possède une branche sur l’île de Sumatra. Dans le passé, les mères étaient tuées et leurs petits recueillit et vendus comme animaux de compagnie. Ce n'est cependant pas la principale cause du déclin rapide de l'espèce. La déforestation au profit de la monoculture de palmiers produisant principalement l'huile de palme a atteint plus de 8 millions d’acres, le tiers de l’île. Difficile de ne pas en parler.
 
DSCF7431   DSCF7596 - Copie
                      DSCF8026

           
Grâce entre autre à des projets comme celui du parc National Tunjun Puting employant presqu'exclusivement la communauté locale et aux excursions d'éco-tourisme, l’économie se diversifie un peu et la pression sur l’habitat des orangs-outangs diminue.

En amont, des ONG travaillent sur place pour développer des plans d'aménagement durable afin de préserver la forêt de Bornéo. Cette dernière est considérée comme #2 en biodiversité après l'Amazonie. Les forêts humides représentent 7% des terres du globe et comprendrait 50% des espèces terrestres vivantes. Le quart des molécules pharmaceutiques de notre époque provient de ce grand édifice. N’étant inventorié qu’à 10%, cette prodigieuse biodiversité pourrait bien détenir la solution à certaines maladies actuelles et futures.

La demande en huile à cuisson et biocarburant provenant de l’huile de palme étant en augmentation, la liste des compagnies voulant des terres pour cette lucrative industrie est longue.

Cette huile est vendue sous l’étiquette de biocarburant, sans que ne soit tenu en compte le fait que l’on a détruit une cathédral pour l’obtenir. Ne connaissant pas ce fait, nous pensons bien agir en l’achetant. C’est bon du cochon, mais on ne l’élève pas sur l’acropole d’Athènes!

Solutions pas simple. Cependant, une chose est claire, la sauvegarde de ce patrimoine passera implicitement par l’amélioration de la qualité de vie des gens qui habitent l’île.

Pas simple mais possible…

Il est encourageant de voir que des organisations telle CIFOR, travaillent à ce que les erreurs commises en occident ne soient pas répétées, en collaborant avec les indonésiens pour établir des plans d’aménagement durable, qui permettront de bâtir des écoles, des hôpitaux sans compromettre l’avenir des générations futures.

De voir que d’autres travaillent avec eux, pour établir des principes de bonne gouvernance et lutter contre ce que les indonésiens appellent le  ‘’KKN’’ (korupsi, kolusi, neopotism ) pratiqué pendant les 32 années de pouvoir de Suharto.

Que des gens développent des idées telles que le REDD (Reducing Emissions from Deforestation and forest Degradation) qui grossièrement expliqué, permettrait aux communautés, régions  ou pays d’être payés pour maintenir leurs forêts en santé et fonctionnelles.


                                                              DSCF7384 - Copie

Les jolies hirondelles rejoignent leur usine pendant que le soleil plonge derrière des tonnes de bois empilés sur une énorme barge qui passe à côté du voilier qui lui baigne doucement dans une eau contaminée par l’extraction de l’or en amont. Ça pourrait être autrement.

Voilà, c'est le trop peu que l'on a pu voir de Bornéo qui mériterait qu'on s'y attarde beaucoup plus longtemps pour son peuple, sa culture, ses forêts, ses éléphants, crocodiles, oiseaux, papillons, ses 2500 espèces d’orchidées et tout ce que l’homme n’y a pas encore découvert.  

Désolé, publication pauvre en photos, images temporairement prisonnières d’un ordinateur à problème.


















Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire